KALÉIDOSCOPE

Auteur : Marie Caillet
Éditeur : Castelmore
Nombre de Pages : 288
Date de Parution : 15 mai 2019
Mon Avis : (Garanti sans spoilers)
Avec Kaléidoscope, 6ème roman de l’autrice, Marie Caillet (qu’on a pu découvrir avec ses sagas L’Héritage des Darcer et Les Rumeurs d’Issar) s’éloigne provisoirement de son genre de prédilection, la fantaisy, pour se lancer dans un roman fantastique jeunesse. A 12 ans, Naomi a toujours eu un tempérament introverti, cloisonnant ses émotions pour faire face à un quotidien pas toujours des plus faciles. Elle a vécu avec beaucoup de souffrance la séparation de ses parents même si elle s’est appliquée à ne pas accabler sa mère de ses sentiments, déjà bien occupée à gérer les esclandres de sa sœur ainée, qui a manifesté avec force son désaccord face à cette nouvelle vie. Si la dernière année a été difficile, cela le devient encore plus quand il s’agit de s’adapter à un départ de Paris pour la Bourgogne, nouvelle vie avec le compagnon de sa mère, et une redoutée rentrée dans un nouveau collège. Comme elle le craignait, sa vie au collège est rapidement éprouvante et Naomi se retrouve isolée, objet des moqueries de ses camarades. A la Toussaint, hantée par la perspective des semaines encore à venir avant la fin de l’année, elle retrouve avec félicité sa grand-mère et sa maison, véritable cocon où elle se sent apaisée. Sensible à la détresse de sa petite fille, sa grand-mère lui offre un objet nimbé de mystère, un vieux kaléidoscope. En regardant à travers, Naomi plonge dans un univers chatoyant et étrange, lieu effrayant et envoutant qui devient vite un abri pour tenir à distance tout ce qui angoisse la jeune fille… Roman qui s’aventure dans le fantastique, Kaléidoscope reste avant tout un récit contemporain où l’autrice traite avec sensibilité et pudeur de la complexité à être soi et trouver sa place dans un monde dont on ne possède pas toujours les clés. Naomi est très touchante dans sa manière d’être et sa difficulté à établir des relations au collège. Plus mâture mais aussi plus sensible que ses camarades, elle souffre de son incapacité à être elle-même avec les autres. "Moi aussi, je donnerais tout pour être normale, complète. Mais j’ai l’impression que les trois quarts de ma personnalité restent scellés derrière mes lèvres, mes yeux baissés, mon corps raide." Le collège est pour beaucoup une période difficile, moment de transition où l’on quitte l’enfance vers… on ne sait quoi encore. Certains semblent traverser cette période avec aisance, sachant déjà, semble-t-il, vers quel but tendre. Naomi au contraire a le sentiment de ne pas être "outillée" comme les autres, trop à fleur de peau, trop fragile pour savoir où mener sa barque. "J’ai l’impression que je ne sais pas faire comme les autres." Sa sœur ainée est son antithèse, impétueuse mais toujours prête à provoquer la rencontre, à aller vers les autres, tempérament qui renforce le sentiment de décalage de Naomi. Dans ce contexte, son kaléidoscope et l’univers qu’il lui ouvre deviennent rapidement un moyen de créer un espace de transition où elle peut s’épanouir, apposant un filtre sur un réel trop dur afin de le rendre plus supportable. On retrouve beaucoup de poésie et de finesse dans ce choix d’un objet qui modifie notre vision du monde pour nous le rendre moins effrayant, le pouvoir de l’imaginaire, mais également ses risques, pour appréhender un quotidien qui nous apparait hostile. Les relations familiales sont traitées sans pathos et l’autrice dépeint sans fard les petits conflits ou incompréhensions dues aux façons de penser et de fonctionner différemment. La famille recomposée est montrée sous un angle réaliste, avec un beau père très touchant, souvent maladroit, mais qui s’avère en capacité de partager la sensibilité de sa jeune belle-fille. |
Marie Caillet signe un roman qui se lit d’une traite, traitant avec délicatesse et poésie de cette période douce-amère qu’est l’adolescence et du sentiment de différence et d’isolement que l’on peut éprouver à cet âge. Ce roman simple et touchant offre une jolie métaphore sur le pouvoir de l’imaginaire afin de rendre le réel plus beau, en y apposant un filtre qui le rende plus supportable. ... Bonne Lecture ... |