Titre : #Murder
Auteur : Gretchen McNeil
Editeur : Editions Milan
Nombre de Pages : 388
Date de Parution : 16 octobre 2019
Mon Avis : (Garanti sans spoilers)
# Murder est un roman qui développe un scénario assez déroutant : et si les condamnations à mort étaient l’occasion de faire une émission de télé-réalité où l’exécution du condamné serait orchestrée et scénarisée dans un but d’audimat ? Cette idée parait complètement surréaliste mais quand on voit qu’aux Etats-Unis, des individus acceptent d’endurer de la torture physique et psychologique au cœur d’une maison hantée en vue de toucher une somme d’argent, on commence à douter de ce qui apparait comme improbable et on débute ce thriller dystopique avec une point d’appréhension. Dee, 17 ans, se réveille devant un labyrinthe qu’elle reconnait pour l’avoir vu à la télévision, lieu où l’un des tueurs officiels d’Alcatraz 2.0, la célèbre émission de téléréalité, prend plaisir à torturer et terrifier ses victimes avant de les exécuter. Sans doute droguée pour être conduite ici, ses derniers souvenirs sont les mots du juge la condamnant à la peine de mort pour le meurtre de sa demi-sœur. Il n’existe aucune échappatoire à Alcatraz, la seule question est de savoir combien de temps vous allez tenir avant de succomber et de quelle façon vous allez mourir, les tueurs étant aussi démonstratifs que sadiques. Mais Dee n’a pas envie de jouer le jeu, d’accepter la place d’agneau en attente du sacrifice et est bien décidée à trouver l’assassin de sa sœur. Le roman se présente sous une forme que j’affectionne énormément puisque le texte est agrémenté de pages de tweets, messages et autres réactions des téléspectateurs. Ce procédé permet de saisir le décalage ahurissant entre ce que vivent les condamnés et ce qu’en perçoivent les téléspectateurs. Véritable expérience de Milgram revisitée, ce roman dénonce et dérange puisqu’il part du postulat que la société est prête à cautionner un tel système qui tourne la mort, la peur et la souffrance d’un homme en un spectacle (on n’est pas loin des jeux d’arène vous me direz…). Ce qui devrait relever de l’intime, même dans le cas d’une condamnation, est scénarisé et "offert" à tous pour satisfaire les pulsions morbides des auditeurs. Comme dans les expériences de sociologie, l’autrice montre combien la distance relative avec ceux qui subissent cette torture semblent autoriser et cautionner cette violence. L'intrigue se révèle passionnante car composée de plusieurs strates dont l'épicentre est notre héroïne Dee, qui va devoir à la fois élucider le meurtre de sa demi-sœur et prouver son innocence, trouver une échappatoire à cette ile et replonger dans un évènement traumatique qui a changé sa vie alors qu'elle n'avait que 11 ans. Les évènements tendant à montrer que tout est intriqué bien que cela paraisse surréaliste. Il faut bien se l'avouer, le point central de ce roman sont les nombreuses scènes d'assassinat (et oui, ce roman ne porte pas son nom pour rien), dont l'aspect visuel et scénaristique est au premier plan. L'auteur n'y va pas avec le dos de la cuillère et nous oblige à être dans la même position que les téléspectateurs, à la fois horrifié de ce qui se déroule mais également dans une attente morbide de la suite. Tout ceci contribue à nous laisser dans une ambiance poisseuse, oppressante, qui réveille la paranoïa des condamnés mais bien évidemment celle aussi du lecteur. On a le sentiment que l'arrivée de Dee est ce qui fait dérailler la machine tout en se demandant si tout n'est pas orchestré pour offrir une nouvelle forme de spectacle aux abonnés. Même si l'aspect thriller est bien plus présent que l'aspect dystopique, #Murder est une dénonciation de la peine de mort et d'un système judiciaire gangréné qui prononce des sentences sans preuves conséquentes. Il est aussi une dénonciation de la violence cautionnée et justifiée par l'idée que, puisque les condamnés sont coupables, leur sentence et leur souffrance sont justifiées. #Murder est un roman qui se suffit à lui-même bien qu'une suite existe. Un bon nombre de réponses sont exposées au terme du roman même s'il m'a manqué des explications plus concrètes pour asseoir la cohérence de l'intrigue. |
#Murder est un roman surprenant dont le thème central interroge et fascine. Une fois que l'on a ouvert ce roman, on ne peut plus le lâcher, complètement happé par cette ambiance à la Dix Petits nègres, curieux de savoir si notre héroïne va s'en sortir et surtout savoir qui se cache derrière cette mise en scène démesurée. |
... Un Roman Haletant ...
pour leur confiance